Il y a 140 ans naissait Eugène Bizeau

Le 29 mai 1883 naissait à Véretz Eugène Bizeau. Vigneron, poète, chansonnier, anarchiste, libertaire et pacifiste, il consacra sa vie à l'écriture.

Deuxième enfant d'une famille de vignerons socialistes et anticléricaux, Eugène Bizeau découvre très tôt les idées libertaires et anarchistes. A l'âge de 7 ou 8 ans, il écrit ses premiers poèmes et affirme dès l'adolescence ses convictions politiques : il défend la paix, la démocratie et le progrès social. En 1898, il apprend le métier de vigneron et découvre les journaux libertaires qui lui sont présentés par des ouvriers de passage, devenus employés des chemins de fer. De 1895 à 1902, il assiste à Tours à de nombreuses réunions politiques composées d’ouvriers et d’intellectuels. 

Il collabore à la revue « L’Anarchie ». En 1910, il participe à « la Muse Rouge », groupe de poètes et chansonniers révolutionnaires. 

Sa plume dénonce avec flamme la guerre, les militaires, les curés et les patrons. Mais, Eugène Bizeau n'est pas qu'un irréductible insurgé : il écrit aussi de nombreux poèmes empreintes de douceur et d'émotion, consacrés à la Touraine, sa famille, à l'amitié.  

Nombreux sont ses poèmes mis en musique dans les années 1912 -1924. 

Debout, les révoltés !

Debout classe ouvrière !

Debout contre l’horreur d’un massacre nouveau !

Debout pour que la paix triomphe de la guerre

dans la félicité d’un avenir plus beau !

Debout les asservis !

Debout les mercenaires !

Debout pour le salut de votre liberté !

Puisque dans la douleur tous les peuples sont frères !

Debout pour le bonheur dans la fraternité !

Chanson « Fraternité », texte d’Eugène Bizeau, éditions de la Muse Rouge, 1913.

Il épouse en 1916, en Auvergne, Adélaïde Chambonnière, institutrice et poète qui partage ses idées anarchistes. Le couple s'installe à Massiac en Auvergne, Eugène Bizeau y travaille comme jardinier, sa femme n'ayant pu obtenir sa mutation en Touraine. Ils ont deux enfants.

A la fin de la seconde guerre mondiale, ils reviennent vivre 27, rue Chaude à Véretz. Le poète renoue alors avec son métier de vigneron. À quatre-vingt-dix ans, il doit renoncer à cultiver sa vigne. Veuf en 1974, Il occupera ses journées jusqu'à la fin de sa vie en 1989 à soigner son jardin, cuisiner, écrire, ... Membre actif d’Art et Poésie de Touraine, association régionale de poésie, il fait partie du jury pour la remise des prix des Jeux Floraux qui ont lieu tous les deux ans.

 A sa mort, à 106 ans, il est reconnu comme le plus ancien abonné  du « Canard enchaîné ». Il a d’ailleurs été plusieurs fois croqué par Cabu. 

 La ville de Véretz lui a dédié sa salle polyvalente inaugurée en 1989, l'année même de sa mort. 

J’écris depuis longtemps au rythme d’un poème

Pour dire à quelques-uns ma joie ou ma rancœur,

Pour servir l’idéal que j’ai choisi moi-même

Quand j’avais du courage et du soleil au cœur

Les mots dont je me sers sont des grains que je sème

Sans espérer qu’un jour il en naîtra des fleurs…

S’il en est dont le sens est révolte ou blasphème, 

c’est qu’ils sont inspirés par d’injustes douleurs.

J’écris, aiguillonné par le besoin d’écrire, 

Comme on rit, comme on pleure au cours d’un grand délire

Dont il ne reste rien quand le souffle est parti.

Je suis l’humble artisan d’une tâche inféconde,

Mais devant les malheurs qui planent sur le monde,

Je rougirais d’être de ceux qui n’ont rien dit !

J’écris depuis longtemps…Eugène Bizeau, 1983.