231J - Fonds Victor Pierre Honoré (1872-1897), instituteur (1889-1892)

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Cote/Cotes extrêmes

231J (Cote)

Date

1889-1896

Origine

Honoré, Victor-Pierre, enseignant (Indre-et-Loire)

Biographie ou Histoire

Victor Pierre Honoré est né à Fresnes (Loir-et-Cher) le 18 mai 1872, fils de Pierre Honoré (né à Fresnes) et de Rose Dubois (née à Villentrois). Il est nommé élève-maître à l'école normale d'instituteurs de Blois pour la promotion de l'année scolaire 1889-1890 (écrit de Paris le 2 septembre 1889). Il est instituteur stagiaire à l'école publique de garçons de Romorantin. Son service commence le 4 janvier 1892. Puis il effectue son service militaire et revient à Romorantin le 1er septembre 1894. Le 6 décembre 1894, il est nommé instituteur stagiaire à Lance. Il est nommé le 1er septembre 1895 à Bourré. Il est titularisé et promu avec effet à partir du 1er janvier 1896, à Bourré. Il décède à Fresnes le 1er juillet 1897. Il est resté célibataire (Texte rédigé par la donatrice Mme Claire Buzelay, le 23 octobre 2012).

Victor-Pierre Honoré dut obtenir son certificat d'études primaires vers l'âge de 13 ans. Puis il dut poursuivre sa scolarité pendant trois années dans une école primaire supérieure ou cours complémentaire et obtint son brevet élémentaire, lui permettant de postuler au concours pour son admission à l'école normale de garçons de Blois. Après trois années d'apprentissage, il dut obtenir son brevet de capacité pour l'enseignement primaire ou brevet supérieur. Instituteur stagiaire pendant une année, il fut titularisé comme adjoint dans une école de garçons l'année suivante. Lors de sa formation, il devait porter un uniforme réglementaire et intervenir régulièrement dans des classes de l'école annexe ou d'application de l'école normale de Blois.

Témoignage de Charles Peguy (1873-1914) dans son essai L'argent, sur son enfance à l'école primaire qui était aussi l'école annexe de l'école normale de garçons d'Orléans (de 1879 à 1885) :

« C'était le civisme même, le dévouement sans mesure à l'intérêt commun ; notre jeune École normale était le foyer de la vie laïque, de l'invention laïque dans tout le département, et même j'ai comme une idée qu'elle était un modèle et en cela et en tout pour les autres départements, au moins pour les départements limitrophes. Sous la direction de notre directeur particulier, le directeur de l'École annexe, de jeunes maîtres de l'école normale venaient chaque semaine nous faire l'école. Parlons bien : ils venaient nous faire la classe. Ils étaient comme les jeunes Bara de la République. Ils étaient toujours prêts à crier Vive la République ! Vive la nation, on sentait qu'ils l'eussent crié jusque sous le sabre prussien. Car l'ennemi, pour nous, confusément tout l'ennemi, l'esprit du mal, c'était les Prussiens. Ce n'était déjà pas si bête. Ni si éloigné de la vérité. C'était en 1880. C'est en 1913.

Trente-trois ans. Et nous y sommes revenus.

Nos jeunes maîtres étaient beaux comme des hussards noirs. Sveltes ; sévères ; sanglés. Sérieux, et un peu tremblants de leur précoce, de leur soudaine omnipotence. Un long pantalon noir, mais, je pense, avec un liséré violet. Le violet n'est pas seulement la couleur des évêques, il est aussi la couleur de l'enseignement primaire. Un gilet noir. Une longue redingote noire, bien droite, bien tombante, mais deux croisements de palmes violettes aux revers. Une casquette plate, noire, mais un croisement de palmes violettes au-dessus du front. Cet uniforme civil était une sorte d'uniforme militaire encore plus sévère, encore plus militaire, étant un uniforme civique. Quelque chose, je pense, comme le fameux cadre noir de Saumur. Rien n'est beau comme un bel uniforme noir parmi les uniformes militaires. C'est la ligne elle-même. Et la sévérité. Porté par ces gamins qui étaient vraiment les enfants de la République. Par ces jeunes hussards de la République. Par ces nourrissons de la République. Par ces hussards noirs de la sévérité. Je crois avoir dit qu'ils étaient très vieux. Ils avaient au moins quinze ans. Toutes les semaines il en remontait un de l'École normale vers l'École annexe ; et c'était toujours un nouveau ; et ainsi cette École normale semblait un régiment inépuisable. Elle était comme un immense dépôt, gouvernemental, de jeunesse et de civisme. Le gouvernement de la République était chargé de nous fournir tant de jeunesse et tant d'enseignement. L'État était chargé de nous fournir tant de sérieux.

Cette École normale faisait un réservoir inépuisable. C'était une grande question, parmi les bonnes femmes du faubourg, de savoir si c'était bon pour les enfants, de changer comme ça de maître tous les lundis matins. Mais les partisans répondaient qu'on avait toujours le même maître, qui était le directeur de l'École annexe, qui lui ne changeait pas, et que cette maison-là, puisque c'était l'École normale, était certainement ce qu'il y avait de plus savant dans le département du Loiret et par suite, sans doute, en France. Ces jeunes gens qui venaient chaque semaine et que nous appelions officiellement des élèves maîtres, parce qu'ils apprenaient à devenir des maîtres, étaient nos aînés et nos frères. Sortis du peuple, mais dans l'autre sens de sortir, fils d'ouvriers, mais surtout de paysans et de petits propriétaires, souvent petits propriétaires eux-mêmes, de quelque lopin de terre quelque part dans le département, ils restaient le même peuple, nullement endimanché je vous prie de le croire, seulement un peu plus aligné, un peu plus rangé, un peu ordonné dans ces beaux jardins de maisons d'école. Avant tout ils ne faisaient pas les malins. Ils étaient juste à leur place dans une société bien faite. Ils savaient jusqu'où ils iraient, et aussi ils y parvenaient infailliblement.

C'était en 1880. C'était donc dans toute la fureur et la gloire de l'invention de la laïcisation. Nous ne nous en apercevions pas. Nous étions pourtant bien placés pour nous en apercevoir. Non seulement les écoles normales, nouvellement créées, je pense, non seulement les jeunes écoles normales étaient le cœur et le foyer de la laïcisation, mais notre École normale d'Orléans était une pure entre les pures. Elle était une des têtes et un des cœurs de la laïcisation. Heureuse enfance. Heureuse innocence. Bénédiction sur une bonne race. Tout nous était bon. Tout nous réussissait. Nous prenions de toutes nos mains et c'étaient toujours de saines nourritures. Nous allions au catéchisme, le jeudi je pense, pour ne pas déranger les heures de classe. Nous étions des petits garçons sérieux de cette ville sérieuse, innocents et au fond déjà soucieux. Nous prenions au sérieux tout ce que l'on nous disait, et ce que nous disaient nos maîtres laïques, et ce que nous disaient nos maîtres catholiques. Nous prenions tout au pied de la lettre. Nous croyions entièrement, et également, et de la même créance, à tout ce qu'il y avait dans la grammaire et à tout ce qu'il y avait dans le catéchisme. Nous apprenions la grammaire et également et pareillement nous apprenions le catéchisme. Nous savions la grammaire et également et pareillement nous savions le catéchisme. Nous n'avons oublié ni l'un, ni l'autre. »

Présentation du contenu

Le fonds se compose des cahiers de notes de cours et des copies d'examen de Victor-Pierre Honoré, élève-maître à l'école normale d'instituteur de Blois, de 1889 à 1892. Il comprend également le cahier-journal qu'il a tenu ensuite dans ses fonctions d'instituteur titulaire de la commune de Bourré (Loir-et-Cher).

Ce type de document, rarement conservé, reflète une partie du savoir enseigné quelques années après les lois Ferry de 1881 et 1882 dans les écoles normales d'instituteurs, qui formaient ceux qu'on appellera plus tard les "hussards noirs de la République".

La pédagogie diffusée à l'élève-maître devait « l'armer d'un bagage théorique qu'il [aurait] l'occasion de confronter à la réalité des classes primaires, et qui présent dès ses premières expériences professionnelles [serait] l'outil d'une réflexion et d'un perfectionnement ininterrompus » (G. Laprévote, Les Écoles normales primaires en France, 1879-1979 : splendeurs et misères de la formation des maîtres, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 1984,  p. 27).

À partir des années 1880, le programme des écoles normales s'élargit au-delà de la lecture, de l'écriture et du calcul à de nouvelles matières obligatoires comme l'histoire, la géographie, la rédaction, la musique, les sciences physiques et naturelles, l'agriculture, le travail manuel, la gymnastique et le dessin. Hormis pour les deux dernières matières citées, les notes prises en cours par Victor-Pierre Honoré renseignent sur ces enseignements nouveaux.

Informations sur le traitement

Classement définitif

Cahier-journal tenu par Victor-Pierre Honoré pendant l'année où il fut l'instituteur de l'école de Bourré (Loir-et-Cher).

Cote/Cotes extrêmes

231J6 (Cote)

Date

1895-1896